La pièce se passe dans une maison de retraite, sur une terrasse ; pas la terrasse
principale bien sûr, mais celle de derrière, celle où les autres, « les vieillards »,
ne viennent pas. En réalité cette "terrasse-prison" sans mur est le refuge de Gustave,
Fernand et René. Refuge où ils résistent au pouvoir, alias Sœur Madeleine, qui
semble-t-il tente de les intégrer au reste des pensionnaires et par là même les priver
de leur indépendance.

Ici, il faut donc « passer le temps ». Ce temps qu'il faut retenir, de peur que ne se
déroule trop vite le peu de fil qu'il reste sur la bobine. Certes, ces trois là s'agitent à
ne rien faire et y dépensent beaucoup d'énergie, mais comme beaucoup de
personnes qui n'ont plus grand chose à faire ou qui n'ont plus d'espoir. Néanmoins
ils ont le courage de ne pas renoncer totalement.

Alors en avant toute, pour les ambitions, les fantasmes, les vantardises et les
fanfaronnades, les rêveries et les mensonges sans limite : rêvons grand, même si
l'on agit petit. Tous les appétits de la vie sont réveillés au bruissement du vent dans
les peupliers, regonflés de désirs comme la voile du bateau à la première promesse
de brise, donnant une fois de plus à vérifier l'irrésistible drôlerie de nos désespoirs.

L'un des personnages finira par avoir le courage de demander ce qu'ils feront une
fois là-haut sur la colline. Cette question chacun peut se la poser à tout âge :
Qu'est-ce qu'on va faire après ? Mais à vouloir donner un sens à tout ce qu'on fait,
on a de grandes chances de s'arrêter net et de n'en trouver aucun.

Il faut sans doute à la fois agir et réfléchir au sens de son action, mais surtout ne pas
renoncer même si cela doit passer par une agitation vaine… De toute façon on en
est tous là, il faut l'assumer et en goûter les plaisirs.
 
                                                                                            Extrait d'un entretien radiophonique de
                                                                                                         Gérald Sibleyras
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